Angres : comment la police de Sarkozy-Besson prépare ses mauvais coups

De Politis 62
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Au moment de la destruction du camp de migrants vietnamiens, le 8 septembre 2009, plusieurs bénévoles de Fraternité Migrants Bassin Minier 62 avaient clairement dévoilé le stratagème policier : c'est la police, la PAF, qui a incité le propriétaire du terrain, chemin des vaches, à porter plainte (alors que ledit terrain, squatté par les migrants depuis plusieurs années, est jonché des ruines d'une ancienne maison, et est parfaitement inutilisable à quoi que ce soit). Nous avions d'ailleurs écrit sur ce site :

Le discours policier est bien rodé : « nous intervenons suite à une plainte du propriétaire
du terrain, qui souhaite accéder à son bien ». Les média reprendront ce refrain toute la 
journée. Personne n'est dupe : c'est la PAF qui a fortement incité ledit propriétaire à porter plainte.. 

Voir l'article original : Destruction du camp de migrants d'Angres

Aujourd'hui, début novembre 2009, nous sommes en capacité d'apporter la preuve de ce que nous avancions à ce moment là. Et cette preuve, c'est la police elle même qui nous la fournit, et qui nous l'écrit, noir sur blanc, dans le cadre de la préparation de la prochaine rafle de migrants à Angres. Nous verrons également comment la police exerce une pression éhontée pour obliger, ni plus ni moins, un privé à porter plainte, et à autoriser l'intervention policière sur sa propriété.

Le contexte du camp de migrants vietnamiens à Angres, début novembre 2009

Suite à la destruction de leur campement, chemin des vaches, les migrants vietnamiens se sont réinstallés dans un nouveau campement, toujours le long de l'autoroute, leur objectif restant de camper à proximité de l'aire d'autoroute, pour monter dans des camions en direction de l'Angleterre. Ils sont donc maintenant dans un bois, toujours sur la commune d'Angres.

Ce bois est un bois privé, comme l'était l'ancien terrain, mais il appartient à de nombreux propriétaires, qui, pour la plupart, ne se connaissent pas, et qui sont même plusieurs à ne pas y avoir mis les pieds depuis très longtemps. Le bois était jusqu'à présent utilisé par la société de chasse d'Angres, qui avait « des baux de chasse », contractualisés avec les propriétaires, pour les autoriser à chasser.

Suite à plusieurs remembrements, les parcelles privées ont été réajustées. Aujourd'hui, chaque parcelle est une bande de terrain dont la longueur traverse tout le bois, et dont la largeur fait seulement quelques mètres. Ainsi, le camp de migrants vietnamiens est à cheval sur 4 à 5 parcelles.

Il se trouve que l'une de ces parcelles appartient à un membre de notre collectif, Fraternité Migrants Bassin Minier 62.

La politique de Sarkozy-Besson

Nous nous sommes exprimés à plusieurs reprises concernant les intentions du gouvernement Sarkozy-Besson. Il s'agit de :

  • mettre en place des actions de communication, à grands renforts de caméras et de communiqués de presse, visant à entretenir l'idée que la situation des migrants dans le Pas-de-Calais est sous contrôle.
  • flatter l'électorat de la droite extrème, en ces temps ou les citoyens sont régulièrement appelés aux urnes. Typiquement, les prochaines élections, régionales, auront lieu dans quelques mois, en mars 2010.
  • criminaliser les migrants, au lieu de rechercher des solutions pérennes.
  • persister sur la voie de la répression, plutôt que de la réflexion.

Ainsi, au dessus de chaque camp, à Angres, Norrent-Fontes, Teteghem, Calais... pend une menace constante : la rafle policière, avec destruction des camps, et enfermement des migrants, Tout cela est vain : systématiquement les migrants sont relachés, mais la politique de messieurs Sarkozy et Besson passe par cette agitation permanente, à destination des média, et dont les migrants sont les éternelles victimes.


La préparation d'une rafle

Pour donner un semblant de cohérence aux rafles, la PAF s'abrite en général derrière deux possibilités :

  • Le trouble à l'ordre public.
  • La plainte d'un privé qui s'estime floué dans son droit de propriété.

Pour le camp de migrants d'Angres, il est à peu près impossible d'invoquer le trouble à l'ordre public : les migrants vietnamiens sont tout à fait acceptés par la population angroise, qui a fortement manifesté sa solidarité, notamment à l'occasion du Camp Besson, sur la place de la mairie (voir : Camp de migrants sur la place d'Angres

C'est donc par la case dépôt de plainte que la police cherche à passer. Cette fois-ci, c'est un peu plus compliqué, parce qu'il y a plusieurs propriétaires concernés.

1ère étape : la pression

Nous avons recueilli le témoignage d'un propriétaire d'une parcelle du bois, lui même membre du collectif Fraternité Migrants.

Les propriétaires de 7 parcelles, sur lesquelles les migrants sont installés ont été convoqués.
Ça correspond en fait à 6 propriétaires, puisque deux parcelles appartiennent à la même personne.

Le capitaine de police est chargé de poser deux questions centrales :
    1°) Est-ce que vous déposez plainte ?
    2°) Est-ce que vous vous opposez à l'intervention des forces de police sur votre propriété ?

Pour « aider au dépôt de plainte », deux arguments sont mis en avant :
    1°) Les dégradations : c'est un argument qui ne tient pas, le bois n'ayant subi aucun dommage, 
    de quelque nature que ce soit.
    2°) Les détritus : il n'y a pas non plus de problème de détritus. Les migrants déposent leurs 
    déchets dans les containers stockés au pied de l'antenne, et enlevés par la société d'enlèvement 
    des ordures ménagères, régulièrement. Il suffit de se rendre sur place pour constater la propreté.
    On peut même préciser que, quand les migrants sont arrivés en septembre, il y avait de nombreux
    détritus, que les migrants ont eux mêmes nettoyés.

Dans ma déposition, j'ai clairement indiqué que je ne déposais pas plainte, et que je m'opposais à 
l'intervention des forces de police sur ma propriété. Le capitaine de police m'a indiqué qu'une 
autre personne avait agi comme moi, alors que quatre autres avaient porté plainte.

2ème étape : l'intimidation

C'est dans l'air du temps : en France, en 2009, sous le gouvernement de Nicolas Sarkozy, pas une tête ne doit dépasser. Puisque les Français ont voté pour ce gouvernement, tout doit plier devant lui.

Il est donc parfaitement incongru, inadmissible, que quiconque entrave la glorieuse marche du ministre des expulsions. En clair, puisque notre homme n'a pas voulu déposer plainte et autoriser la police de sa majesté à intervenir sur sa propriété, qu'à cela ne tienne : il faut lui faire entendre raison.

C'est ainsi que, 24 heures après la première audition, notre ami se voit de nouveau appelé au commissariat pour lui faire signer un nouveau procès-verbal. Voici un extrait de ce PV :

Par ailleurs, vous m'informez que le fait d'aider au séjour irrégulier d'une personne étrangère en France
est un délit, défini par l'article L 622-1 al 1 al 2 du code des étrangers et réprimé par les articles
L622-1 al 1 et L 622-3 du code des étrangers.

Le contenu de ces différents articles n'a pas été précisé.

Que faire maintenant ?

Il est clair que le refus initial du dépôt de plainte n'a pas été accepté par la hiérarchie policière, qui, en 24 heures, a réorienté sa stratégie : Puisque le monsieur ne veut pas coopérer, et admettre que c'est intolérable ces gens qui laissent des détritus et violent la propriété privée, on va le menacer (oh, courtoisement, on est encore entre gens de bonne compagnie !!) de lui coller un petit délit sur le dos : aide au séjour irrégulier.

Bref : après la criminalisation des migrants, et la criminalisation des bénévoles, vient la criminalisation des citoyens. Tout ça ne sent pas très bon. Il y a de forts relents nauséabonds, à l'image du grand débat sur l'identité nationale.

Du côté de Fraternité Migrants Bassin Minier 62, nous voilà au moins prévenus : il y a de la rafle dans l'air... encore que ! Il leur faut au préalable obtenir l'autorisation d'intervenir... ou alors, il leur faut trouver la bonne raison pour intervenir, contre l'avis des propriétaires récalcitrants.