Une gauche politique dans le Pas-de-Calais, dans le bassin minier

De Politis 62
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Nous revenons aujourd'hui sur l'analyse et les propositions de Paul Ariès, dans le n°3 du Sarkophage : Éditorial n°3 : Exit le troisième tour social ?. :

  • La gauche est aphone, l'extrème gauche ne vaut pas mieux.
  • Rien ne sera possible sans la refondation d'une gauche politique. Deux conditions minimales : oser dire que le parti socialiste n'est plus un parti de gauche (...) Renouer ensuite avec nos grandes valeurs que sont le partage et la fraternité.
  • Pour que s'impose dans le champ politique un projet neuf et à la hauteur des enjeux, il faut qu'apparaisse une force politique neuve capable de porter ce projet fédérateur. Pas une coalition, mais une force unitaire à la fois plurielle et cohérente.
  • Peu importe le nom que prendra cette nouvelle force, mais on ne fera pas l'économie de nouvelles Assises de la gauche permettant de redéfinir un projet politique capable de s'adresser autant au coeur et aux tripes qu'à la raison et aux intérêts des plus pauvres.

Rappel : Si vous souhaitez vous procurer le Sarkophage, contactez nous : politis62_@_politis62.org (enlever les _ )

Dans le Pas-de-Calais, d'une manière générale, et dans le bassin minier, en particulier, il est plus que temps de s'inscrire dans la construction de cette force politique neuve : la résistance à la politique de Sarkozy n'est pas à la hauteur, les enjeux passent par une rupture totale et définitive avec le système capitaliste.

Les élections municipales et cantonales se déroulent dans moins de trois mois, et ne résoudront rien, pour ce qui concerne la construction d'une perspective politique, seul préalable à de grands mouvements sociaux. Elles peuvent néanmoins permettre de « mettre sur la table » un certain nombre d'exigences qui s'inscrivent, au plan local, dans la rupture avec le capitalisme :

  • exiger la représentation proportionnelle pour toutes les élections, le respect du non cumul des mandats, l'adoption du mandat impératif, la mise en place d'un régime « primo-ministériel » contre la présidentialisation et la « peopolisation » du pouvoir.
  • mettre en chantier une réflexion sur ce que signifie la démocratie, à l'échelle de nos villes, à l'échelle du bassin minier.
  • stopper la perte des commerces locaux, enclanchée par le développement des galeries marchandes. Refuser toute implantation nouvelle de grande zone commerciale. Dans chaque village et ville il doit être possible de faire toutes ses petites courses à pied, à une distance de 500 mètres. Notre territoire compte bien trop de zones commerciales géantes, qui imposent un mode de vie uniforme et artificiel. La faute en incombe aux élus qui se sont laissés déposséder de leurs marges d'action, au détriment du politique.
  • faire le choix des régies municipales : les conseillers municipaux élus seront également les élus de leur communauté d'agglomération (Lens-Liévin ou Hénin-Carvin). Ils ont le pouvoir de revenir sur la privatisation de la distribution de l'eau au profit d'opérateurs privés.
  • décréter l'ensemble du bassin minier, ville par ville zone hors AGCS et hors OGM
  • faire reculer l'agression publicitaire dans nos villes. Le droit des usagers à être protégés prime sur celui des marchands à vendre leurs produits. Interdire la publicité dans les écoles. Empêcher la pénétration des marques dans les écoles. Aller vers des villes sans pub, vers un bassin minier sans pub.
  • engager une réflexion de fond sur le développement de médias alternatifs sur le bassin minier, comme moyen de contrer le rouleau compresseur des médias dominants, tout acquis aux idées du capitalisme.
  • développer les transports en commun; arrêter la construction du réseau routier et autoroutier; reconvertir une partie du réseau existant en chemins de fer, en axes piétons, en pistes cyclables, en jardins potagers ou d'agrément; construire des lignes de tramway qui traversent le bassin minier; faire rouler les bus sur une plus grande amplitude horaire, y compris le dimanche; ces mesures doivent faire reculer l'emprise de la voiture : il doit être plus « intéressant » de prendre les transports en commun ou son vélo que de prendre la voiture, pour aller au lycée, au travail, à l'entrainement sportif, en sortie...
  • généraliser une restauration collective (scolaire, entreprise) faite sur place, avec des produits locaux et de saison.
  • développer une préférence pour l'économie locale, favoriser la reconversion des industries sous forme de petites unités à production relocalisée, soutenir le développement des coopératives.
  • refuser les expulsions locatives, les coupures d'eau, d'électricité : comment peut-on accepter qu'une société aussi riche que la nôtre mette à la rue des familles juste parce qu'elles n'ont pas les moyens de payer leur loyer ?
  • mettre en oeuvre une politique culturelle et éducative basée sur des finalités claires : aujourd'hui l'école ne forme pas des citoyens mais des consommateurs. Il faut en revoir les contenus, de même qu'il faut revenir sur l'abandon de la carte scolaire et des enseignements du samedi matin à l'école maternelle-primaire.
  • un problème spécifique du bassin minier : la santé : taux de cancers importants, dégâts causés par l'alcoolisme, dès la naissance. Devant ces problèmes plus importants qu'ailleurs, on ne peut que constater une incurie plus importante qu'ailleurs : manque de médecins et de spécialistes, hopitaux au bord de la faillite...
  • cesser de promouvoir des systèmes d'aide sociale qui maintiennent la population dans une relation de dépendance aux élus : le principal effet de ces mesures est d'acheter la paix sociale en permettant aux individus de survivre, dans une situation de soumission et non de révolte. Cette posture des élus rejoint le développement des stratégies d'individualisation mises en place dans la société, dans l'entreprise, à l'école, dont les conséquences sont le retrait dans la sphère individuelle privée, et l'abandon des stratégies de lutte collective.
  • inscrire la question de l'emploi dans une réflexion plus large sur la production : l'accentuation du productivisme capitaliste est en effet un vrai danger, pour l'individu et pour la planète.
  • parallèlement à la production et au productivisme, se pose la question de la consommation : que met on en place sur le territoire d'un côté pour limiter les gâchis, et de l'autre pour permettre aux habitants d'aborder de manière neuve leur rapport à la société de consommation, fille du système économique capitaliste ?
  • réaffirmer la primauté de grandes valeurs telles le partage et la fraternité : dans l'ensemble des villes du bassin minier, les élus doivent être à l'avant-garde de la réaffirmation de la solidarité avec tous ceux qui souffrent ou qui sont différents : pauvres, étrangers, sans papiers, sans domicile, gens du voyage...


D'une manière générale, ces exigences pour les élections municipales et cantonales peuvent nous permettre de réaffirmer ce que signifie être à gauche aujourd'hui :

Le travail politique essentiel de la gauche ne consiste pas seulement à mobiliser par à-coups les citoyens sur des « causes » ponctuelles,
si légitime moralement et utile politiquement que soit la riposte, ni à mettre au pilori tel ou tel individu, si malfaisant soit-il.
Car ces combats sporadiques et ces exécutions ciblées ne sont rien au bout du compte - voire peuvent servir de diversions - s'ils ne
s'inscrivent pas dans une lutte d'envergure, permanente et sans concession explicitement dirigée contre l'ennemi véritable, c'est à dire
contre le système, source fondamentale de la plupart des maux qui minent matériellement et moralement notre société et la planète tout
entière : la domination écrasante du Capital (la grande propriété privée, industrielle et financière) et son cortège d'exactions,
d'oppressions et de corruptions.
C'est cette lutte là qu'il faut mener et que la gauche institutionnelle a malheureusement abandonnée depuis longtemps. La seule chose qui
l'intéresse, c'est la poursuite, sous couvert de « dialogue démocratique » et d'« ouverture républicaine », du bonneteau politique visant au
partage du pouvoir dans le système, jeu dont la logique implacable conduit ouvertement désormais, à force de démissions et de soumissions,
de ralliements et de reniements, à une prostitution sans masque à l'ordre établi. Non, cette gauche de l'abandon et de la trahison, cette
gauche de droite, cette gauche bourgeoise, nous n'en avons pas besoin. Elle peut crever, le peuple ne s'en portera pas plus mal.

Alain Accardo (sociologue - extrait d'un article paru dans Le Sarkophage).